Autoroute, embranchements et chemins de traverse

Le premier soir de mon nouveau boulot, et bien que j'en sois très contente, une pensée s'est imposée dans mon esprit " difficile de faire plus éloigné de ce qui me rend profondément heureuse".
J'ai accueilli cette pensée. Et je l'observe. 
L'endroit où je me trouve le mieux, c'est dans une forêt, sur un chemin de montagne, chaussures de rando aux pieds. C'est un repas frugal, une infusion chaude, le paysage devant les yeux. C'est ma palette d'aquarelle, mon carnet, et le temps qui coule.

Mon travail, que j'apprécie par ailleurs, c'est 60 à 65 heures par semaine, c'est l'ultra productivité, c'est l'anticipation et l'hyper vigilance. C'est la compétition, tout le temps. Ce sont les départs dans la nuit et les retours dans la vie. La vie dans une tour de La Défense, sous la lumière électrique et à température constante. 

Je me dis parfois que j' ai du faire le mauvais choix à un moment. Que j'ai raté un embranchement. 
En réalité, j'ai fait ce qu'on attendait de moi ou ce que je pensais qu'on attendait de moi. Un bac scientifique parce que je pouvais le faire, une hypokhagne parce que je pouvais le faire, une grande école parce que je pouvais le faire, des jobs avec de plus en plus de responsabilités et de plus en plus d'exposition parce que je pouvais le faire. 
Je n'étais pas dupe. Des mes études, je savais que cette voie ne me permettrait pas de m'accomplir. Mais j'ai été élevée dans le sens du devoir et dans l'idée que le plaisir et la joie sont suspectes. 

Ce n'est pas grave. Je sais que des choix se re-présentent régulièrement,que des embranchements existent pour ceux qui veulent les voir. 
Par ailleurs, ce boulot me plaît relativement. L'équipe est chouette,j'ai retrouvé mes anciens collègues-amis et c'est une entreprise qui vit les valeurs qu'elle affiche. 

Je réfléchis à quoi. A quand. A comment. Et les choses ne me paraissent pas insurmontables. 





Commentaires

  1. Et peut-être que tu peux être celle qui aime le calme de la forêt ET la compétition du boulot

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    1. Exactement ce que je me disais en lisant cet article : apprécier la randonnée, la solitude, la montagne, la forêt et sa simplicité par équilibre (et non opposition) avec ce travail à la Défense, dans cette ambiance citadine, ses challenges, ces équipes. Je précise que ceci n'est qu'une interrogation personnelle.

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  2. Bravo pour tes observations lucides. C'est déjà un grand pas vers le respect de soi-même et de sa liberté. Et ça revient à mon rêve : tu sais exactement où tu veux aller ;-)

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  3. Cet article me renvoie à la situation de ma fille, 18 ans1/2. Forte (très) en matières scientifiques et passionnée par le dessin manga qu'elle pratiquait à fortes (très) jusqu'à septembre. Son rêve : éditer ou auto-éditer son 1er manga (ce qui m'a rend heureuse). Son quotidien : une prépa scientifique MPSI où elle n'a le temps de rien (son choix mais je m'interroge sur ses motivations profondes : nous rassurer ?) J'essaie de positiver et d'espérer qu'elle pourra un jour concilier ses 2 chemins (celui où elle est forte et celui qui la nourrit) mais je sais aussi que c'est à elle de trouver sa voie !

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    1. Désolée pour les fautes de frappe car difficile de me relire sur smartphone.

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    2. Je me permets de répondre à ce commentaire-ci car je comprends votre inquiétude et j'ai (espérons-le) un peu de recul sur le parcours dans lequel s'engage votre fille, l'ayant moi-même emprunté il a 20 ans et évoluant depuis dans un monde d'ingénieur.e.s. Les métiers sont ultras-variés, les rythmes de travail aussi. Les temps partiels sont assez faciles à obtenir, contrairement à ce qu'on pourrait penser. Je veux dire par là qu'il est possible de concilier une vie professionnelle "productive" (en terme de rentrées d'argent...) et une passion qui peut tendre à devenir un métier. Les reconversions, sans être une règle générale, existent, tout comme les projets personnels. Je peux citer en puisant dans les exemples de mon entourage : un collègue qui a pris une année sabbatique pour partir vivre en Australie avec sa compagne (elle avait un boulot avant de partir, lui pas, il a trouvé sur place), une autre qui a pris une année sabbatique pour naviguer 1 an en famille (qu'elle finance grâce à son CET), d'autres encore en reconversion, médecin, psychomotricienne, prof évidemment, pour prendre des exemples dans mon entourage, mais il y a tant d'autres exemples... La prépa, ça dure 2 ou 3 ans, mais c'est un tremplin pour toute la vie, qu'on reste ingénieur ou qu'on s'en éloigne. Je la conseille à ceux qui en sont capables. Et pourtant, j'ai détesté cela ! ;-)

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  4. C'est intéressant de poser ça par écrit, et de nous le présenter. Je retrouve des éléments de mon parcours, comme des études suivies "parce qu'on le peut". Mais je sais aussi qu'une grande partie de ces études a réellement fait mon plaisir à l'époque (beaucoup de maths, et 2 voire 3 langues étrangères). Et j'ai cherché, et trouvé, des interstices de liberté dans le système. Par exemple, étudier un an en Espagne meme si c'etait moins prestigieux. Ou quitter ma première entreprise pour travailler en Turquie (ce chemin de traverse-là m'a coûté quelque temps en terme de carrière, mais apporté tellement plus).

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    1. Je continue un peu : je trouve très sain d'y réfléchir et de se questionner, il arrive que malgré le plaisir trouvé au travail (stimulation sociale et intellectuelle par exemple, confort matériel etc), on s'interroge sur l'équilibre de la balance. Plusieurs choses peuvent peser : la finalité, le mode de management, les échanges ou l'alignement avec les collègues... il me semble que tu as traversé des expériences assez diverses. J'aime bien ta notion d'embranchement, elle m'incite à ouvrir plus les yeux à l'avenir !

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