Le jour où j'ai découvert que la vérité était relative
C'est l'histoire d'un cylindre, d'un rond et d'un rectangle.
Il y a quelques
années, j'étais DRH en usine. L'activité n'allait pas fort et nous devions
recourir au chômage partiel. Pour l'avoir pratiqué à plusieurs reprises,
j'étais assez réservée sur ce dispositif. Nous avions aussi de gros problèmes
de qualité.
Ni une, ni deux,
j'ai monté un projet de
professionnalisation nous permettant de lutter contre l'illettrisme. Je suis
allée chercher des fonds auprès de la Région et des OPCA.
Et les ouvriers se
sont retrouvés sur les bancs de l'école plutôt que sur leur canapé ( ma cote de
popularité était au plus haut :-)).
Au bout de quelques séances, j'ai fait un
point avec le formateur. Qui m'a donné une immense leçon de vie.
Il a pris un
cylindre en bois et me l'a mis dans la main. Il m'a invité à l'observer.
Puis il a projeté
l'ombre de celui-ci contre le mur.
D'un certain point
de vue, l'ombre était un cercle parfait.
D'un autre point de
vue, l'ombre était un rectangle.
Et la pièce que nous
avions la main était un cylindre.
Ma vision du monde
en a été bouleversée. J'ai compris que ma vérité dépendait de l'endroit où je
me situais. Qu'une autre personne placée en un autre endroit voyant le même
objet ou la même situation que moi pouvait avoir une vérité absolument
différente.
En disant ça, je ne
milite pas pour la relativité absolue.
Je pense que la réalité est complexe.
Qu'il est essentiel de percevoir la coexistence de plusieurs points de vue, de
plusieurs vérités. Qu'il est important de comprendre aussi que certaines personnes
sont coincées dans leur point de vue et qu'ils n'ont pas la capacité à imaginer
qu'une autre vérité soit possible.
Cette découverte a
été essentielle pour moi. Dans ma vie privée. Dans ma vie professionnelle. Elle
m'aide beaucoup à résoudre les conflits interpersonnels. Et le coup du
cylindre, quelle idée de génie!
je n'ai pas compris le rapport entre la métaphore du cylindre et la situation des ouvriers en formation ?? mais c'est vrai que le jour où on comprend qu'il n'y a pas de vérité absolue, ça change la vie ! Je me souviens très bien du moment où j'ai compris cela : en visite au museum d'histoire naturelle à Paris, il y avait des affiches avec des arborescences représentant le classement dans le règne animal/végétal, ou pour une sous-espèce donnée - à chaque fois, on trouvait un animal ou une plante dont il était dit "anciennement classé dans ... les invertébrés, ou ci ou ça". Mince alors, j'ai vraiment réalisé que même la science antoproclamée absolue n'était qu'une question de point de vue, et qu'effectivement un animal lambda n'était pas intrinsèquement ceci ou cela, mais qu'on pouvait le classer différemment selon le critère regardé. Désormais je me méfie beaucoup plus des étiquettes collées sur les choses ou les gens (et pas juste dans un esprit bien pensant, je veux dire même pour les choses les plus banales, on se rend compte que les classements intellectuels qu'on a admis depuis toujours peuvent être remis en question. Ex : une chose qui m'a révoltée à l'époque, on était locataire d'un immeuble neuf dans lequel il était interdit d'étendre son linge sur les balcons au prétexte que ça faisait "sale" ... qu'y a-t-il de moins sale que du linge sorti de la machine ???! Idem pour la consigne ici à la campagne de désherber devant chez soi pour faire plus "propre" : et si j'aime les plantes sauvages et désordonnées, moi ???)
RépondreSupprimerMerci de ton long commentaire! Ce moment là change l'appréhension qu'on a de la vie!
SupprimerJe suis tout à fait convaincue de cette relativité . Il y a tant de facon de voir une même chose, tout dépend de son histoire, sa culture et pour une même personne parfois même de ses propres émotions. C'est pour cela que je dis aux enfants que 90% de ce qu'on dit n'est qu'une opinion, un avis, un sentiment, quelque chose personnel et que seuls 10% sont vraiment des faits, des "réalités" et que pourtant on a tous tendance à présenter 100% de ce qu'on dit comme une vérité "aboslue"....
RépondreSupprimerj'aime bien cette notion de pourcentage !
SupprimerJ'aime bien ta façon limpide de présenter les choses! Merci
SupprimerMerci de proposer cet éclairage.
RépondreSupprimerDans cette expérience du cylindre, ce qui me fait écho, c'est que le cercle et le rectangle ne sont qu'une projection. Le cylindre, lui, EST et le reste n'est qu'une image. Réalité et Vérité n'étant pas la même chose. "Je ne crois que ce que je vois" était le sujet de philo que j'avais eu au bac. Bien des années plus tard, cette parole reste une source de réflexion.
Nos propres filtres de perception ne sont qu'un élément pour appréhender le monde et heureusement. Sinon, il nous faudrait accepter avec autant de "valeur" celles proclamées par certains . Et là, je ne me résous pas à cette réalité...��
Merci pour ton point de vue qui complète les commentaires ci-dessus : merci!
SupprimerEst-ce que cette expérience n'est pas le premier pas vers l'empathie ?
RépondreSupprimerCe que tu relates résonne pour moi dans ma pratique de formatrice (bénévole) dans une association auprès de bénévoles qui sont en contact avec des personnes en grande précarité (personnes sans hébergement ou mal logées, migrants...). Comment leur faire percevoir la notion d'empathie est un de mes challenge régulier. Donner une définition, c'est facile, mais ressentir, expérimenter, percevoir, c'est autre chose. Il faut avant tout accepter que la perception d'une même réalité - et donc les émotions qu'elle implique - peut être différente pour chacun d'entre nous...
Je tenterai, je crois, la prochaine fois d'utiliser ce cylindre !...
Merci de ce partage.
Bonsoir, ce message est très intéressant et me rappel les séances de psy sur la capacité d'imaginer toutes sortes de vérités sur un seul et même fait et comment certains cerveaux ont tendance à choisir la pire. Qui n'est qu'une vérité parmis tant d'autres et la bonne est souvent celle qui nous fait du bien. Ce psychologue est très bien et travail avec la thérapie ACT, introduite en France par Russ Harris (il me semble) grâce au piège du bonheur, livre que je conseil qui permet de prendre d'une meilleure façon tout ce qui tourne dans notre tête .
RépondreSupprimerLe recours aux illusions d'optique est fréquemment inclus dans les introductions des cours de zététique/esprit critique, que ce soit à l'université, ou dans des conférences, précisément parce que cela permet de prendre conscience du caractère faillible de nos conceptions, sur tout un tas de domaine. C'est un préalable qui permet de discuter beaucoup plus sereinement du reste en général. Après il y a nos perceptions, mais aussi bien entendu notre environnement social qui joue beaucoup... Selon là où on se trouve dans la société, dans la hiérarchie etc on va trouver certaines décisions d'entreprise acceptables ou en tout cas de "bons compromis", là où des syndicats et des orga politiques de gauche radicale (je m'inclues là dedans) vont considérer que ça ne devrait jamais être aux ouvriers de payer
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