Soyez le changement : travailler pour une association, coté pile, coté face


Rejoindre l'économie sociale et solidaire, mettre ma vie professionnelle au service d'une cause en laquelle je crois, cétait un axe essentiel de mon projet de vie, quand je l'ai écrit en 2015. 

 

 

 

En octobre 2016, j'ai eu la chance de pouvoir faire ce grand saut. Quelques mois après, je vous livre un (court) retour d'expérience autour de phrases entendues et rebattues sur les associations :

  • "Dans les associations, on travaille sans moyens" :
Dans un certain nombre de structures, il y a des moyens, de sacrés moyens même. Mais il s'agit souvent d'immobilier ou de fonds difficiles à mobiliser.
Et puis, par leur nature associative, et particulièrement depuis le scandale de l'ARC en 1996, les associations regardent de près leur budget de fonctionnement. Alors oui, travailler dans une association, surtout lorsqu'on vient de grandes entreprises, peut paraître spartiate.
A ce jour, je dois détailler mes projets, les justifier, mais cela fait, il est rare que me soit refusé un investissement jugé nécessaire.
Et certains jours, en cas de baisse d'énergie, je recommande une visite à l'équipe "mécénat et dons" pour une lecture revigorante des petits mots accompagnant les chèques de dons. Les écritures tremblées, les cartes choisies avec soin, les mots gentils pour nous encourager… cela compense largement les moyens restreints.


  • "On travaille dans une association par vocation"
Pour la DRH que je suis, c'est qui est compliqué, c'est de gérer le mélange de motivations. Entre ceux qui sont là parce qu'ils y croient ( qui viennent en général d'entreprises du CAC 40 où ils occupaient des postes à responsabilité et qui ont renoncé à 30,40 ou 50% de leur salaire pour travailler autant), ceux qui sont là parce qu'ils ont répondu à une annonce et qu'ils avaient les compétences demandées, ceux recrutés dans un but social et solidaire ( qui sont souvent des personnes dans une grande précarité familiale, professionnelle, financière…) et ceux qui mélangent un peu des 3…
La co-opération, le travail ensemble tout simplement, est parfois difficile et nécessite des trésors de diplomatie, d'écoute et de souplesse.
De mon point de vue, c'est ce qui rend le poste intéressant également.

  • "Dans une association, les relations de travail sont plus douces"
Moui, les relations de travail restent des relations de travail, avec leurs hauts et leurs bas. Ce qui génère de la souffrance est, de mon point de vue, l'écart entre le fantasme du monde associatif comme un monde de "vrais gentils" et la réalité (et notamment le fait que l'association pour faire avancer sa cause doit être éminemment politique).
Ce qui est encore plus dur, c'est que la frustration ou la déception devant un manager défaillant ou juste moyen qui s'exprime assez bien en entreprise est ici retenu. Le sentiment qui domine est celui que le manager fait de son mieux, mal mais de son mieux.
Et puis mon chef évoque souvent aussi "le syndrome des œufs dans le même panier" : nos salariés ont mis convictions et vie professionnelle dans le même panier ( et c'est notre cas également), ce qui amplifie la joie et les déceptions du quotidien.

Qu'en pensez-vous? On en reparle d'ici quelques mois?

Commentaires

  1. Comme toujours, cet article est passionnant : à la fois réfléchi et plein de nuances, honnête, il me permet une nouvelle fois de faire avancer ma propre réflexion. Un grand merci donc pour ces occasions quotidiennes de faire bouger la pensée ! Je ne commente jamais (erreur réparée !) mais vous lis avec un immense plaisir à chaque fois, et viens régulièrement relire certains de vos posts qui mont marqués.

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    1. Merci Charlotte! Voila qui me donne envie de continuer à publier!

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  2. Je serai effectivement curieuse d'avoir ton point de vue dans plusieurs mois...
    Ce qui est sûr c'est que les relations de travail ne sont pas plus simples dans le secteur associatif (le fameux rapport bénévoles/salariés ou opérationnels / pourvoyeurs de subvention ! )
    En revanche je persiste à croire qu'il est plus épanouissant de travailler pour une organisation qui poursuit des objectifs avec lesquels on est en accord, et que le contraire est usant.

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    1. Je te rejoins complétement sur le sens! A dans quelques mois pour la suite du retour d'expérience ;-)

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  3. Très intéressant! Merci d'avoir partagé ce retour d'expérience!

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  4. Bonjour, je lis toujours vos articles sur votre vie professionnelle avec beaucoup d'intérêt. Pour ma part, j'ai très vite fais le choix du sens plutôt que du salaire, après des études de droit, j'ai choisi de devenir inspectrice du travail (j'espère que la DRH que vous êtes ne va pas "tiquer" trop vite). C'est aussi le milieu d'où je viens (avec une forte culture ouvrière) qui m'a orientée : je n'ai jamais regretté ce choix et vue de ce milieu, le salaire est très correcte (mais bien moins élevé que celui de mes anciennes connaissances de fac...). Je ne vais pas pouvoir dire tout à fait tout ce que je connais des conditions de travail dans le milieu associatif car je suis soumise à un devoir de réserve, mais je dirais malgré tout que les "grosses" associations ont tendance actuellement à mettre en place des stratégies qui se rapprochent beaucoup de celles des grands groupes : la délocalisation par exemple (eh oui, c'est moins chers de faire fonctionner le siège régional en Afrique ou en Inde...), ou encore la réorganisation visant à ne devenir plus que maître d'oeuvre et porteur de projet en "chassant" les dons et subventions, mais en sous-traitant les réalisations (et donc en licenciant éventuellement les salariés souvent investis qui occupaient ces fonctions auparavant). Reste bien sûr tout le milieu des toutes petites associations locales qui fleurissent actuellement. Là, pour le coup, le code du travail est parfois mis en oeuvre de façon un peu "olé olé", mais j'aurais tendance à être plus indulgente, du moins à courts termes. Bien sûr ce n'est qu'un point de vue qui reste extérieur. Bonne journée.

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    1. Bonjour Droles2zebres,
      Merci, merci beaucoup pour ton commentaire!
      J'ai beaucoup d'admiration pour les inspecteurs du travail qui, avec très peu de moyens, tentent de protéger le plus grand nombre. Et surtout les plus faibles. Ca, c'est un sacré job!
      Je n'avais jamais entendu parler de ces pratiques de grosses associations. Et en même temps, je ne suis pas étonnée. Ce doit être particulièrement dur pour les salariés historiques. Ici, on fait du mieux qu'on peut. On écoute les bons conseils. Et on essaie d'être mieux disant en matière de relations du travail et de dialogue social. Vaste programme! Bonne journée à toi aussi

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    2. Bonjour collègue 😀
      Et merci Lathelize, on trouve de bons DRH et de moins bons, de bons inspecteurs du travail et de moins bons, mais c'est toujours agréable d'entendre un DRH dire du bien des inspecteurs du travail !

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  5. J'aime bien ta récap, ni toute rose ni toute noire...
    On y sent aussi ton implication avec des convictions :-)

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  6. Ah ben quel "étrange" concept celui de "tous les oeufs dans le même panier"... m échappe complètement en quoi cela pourrait être négatif :-). La séparation vie pro et valeurs/idéaux est à contrario délétère à moyen terme. Bravo pour ta cohérence et puis pour les mois à venir t inquiète il te suffit de faire au mieux. Et puis les contradictions inhérentes au milieu asso ben vaut mieux qu' elles persistent encore longtemps et que tu trouves huiler les rouages parce que oui y a des grosses assos médico-social qui virent lean managment. A suivre donc avec grand plaisir.

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