Les mains dans l'argile : toi, nous et la leucémie #36

A l’extérieur, la vie continue. Ton frère ne dort pas. Papa non plus : il travaille toujours la nuit pour te consacrer les jours. Et je compte les heures qui me sépare du jour suivant.

L’activité est revenue à l’usine et nous avons dû avoir recours à des intérimaires sur les postes les moins qualifiés, et notamment au déchargement des fours. Ce sont des postes pénibles où sont charriées quotidiennement plusieurs tonnes de matériaux, dans une atmosphère dépassant les 40°.
Un matin avant 7 heures, alors que j’arrive à vélo, une camionnette de pompiers, sirène hurlante, me dépasse. Nous pénétrons en même temps dans l’enceinte de l’usine.
Un intérimaire, présent depuis quelques jours à peine, a fait un malaise cardiaque.  Il meurt immédiatement.

C’est à moi que revient la charge de prévenir la famille. A moi de présider le CHSCT. A moi de trouver un psychologue apte à écouter les membres de l’équipe qui ont tout fait pour le réanimer. A moi aussi de répondre à la police envoyée sur les lieux et rendre des comptes au siège. 

A l’heure du déjeuner, c’est toute la famille en colère qui envahit mon bureau et qui exige que nous la dédommagions. 
Les femmes sanglotent, les hommes menacent, le ton monte. Après des heures de discussion, nous finissons par trouver un accord. 

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